Que faire en cas de #3 : Les traumas (1/2)

par | 13 Juil 2016 | Santé en voyage | 0 commentaires

Troisième chapitre de notre série consacrée à la médecine en voyage : que faire en cas de traumas ? Le propos est vaste et nous avons tenté d’aller à l’essentiel. Afin de ne pas vous perdre en cours de lecture, nous avons décidé de scinder cet article en 2 parties.

Mais, au fait, que désigne-t-on par ce terme médical ? Cette vaste notion définit toutes les atteintes traumatiques – blessures – causées par une cause extérieure. Les traumas sont principalement de 3 types : pénétrant, contondant et barométrique. Ils incluent donc les fractures, luxations, tendinites et autres entorses, que nous aborderons en détails dans ce texte.

Les accidents graves, les polytraumatismes engageant le pronostic vital, sont relativement rares en voyage ou même en expédition. Cependant, les statistiques montrent clairement que les fractures, entorses isolées et autres blessures traumatiques mineures sont relativement fréquentes. L’aspect le plus important de la prise en charge et du soutien d’une victime de traumas est d’éviter le sur-accident et les complications, ainsi que de limiter les douleurs qui seront, à coup sûr, importantes. S’il est nécessaire de déplacer le blessé, il est important de comprendre les enjeux afin qu’une situation ne se dégrade pas et que l’état de la victime ne dégénère pas. Dans certains cas, un voyageur ou un membre d’expédition devra être évacué, mais la plupart des blessures pourront être correctement gérées sur le terrain. Les formations et manuels de premiers soins classiques conseillent toujours dans ces types de cas de ne pas bouger le blessé et de faire appel à l’aide médicale. Attitude souhaitable sous nos latitudes, mais difficile à tenir dans le Cachemire Indien, le fond du Surinam, voire même impossible dans les steppes mongoles. Parfois le premier dispensaire est à un jour, trois jours ou une semaine de mule et dans ce cas, notre équipier de voyage au fémur brisé, il va bien falloir s’en occuper. Ce chapitre aborde les notions suivantes :
  • Approche du blessé traumatisé
  • Les troubles de la conscience
  • Les problèmes aux os et aux articulations
  • La gestion de la douleur

L’approche du blessé traumatisé

Que faire en cas de traumas ? Cours BLS...Prendre un temps de réflexion avant d’aborder le blessé est indispensable. Lorsqu’un accident survient, éviter le sur-accident et d’autres blessés éventuels doit être une priorité absolue. La précipitation entraîne l’imprudence qui, à son tour, ajoute des blessés, diminue les ressources humaines disponibles tout en augmentant les besoins. Une spirale à tout coup délétère pour le groupe et compromettant l’objectif ou la mission. Avant de se diriger vers un blessé, il faut se poser la question suivante : «  Suis-je en sécurité ? » Si oui, évitez de déplacer le blessé. Parfois la situation ne laisse pas d’autre choix que « d’attraper et dégager » le blessé : en cas de véhicule en feu, de risque d’avalanche, d’effondrement, de fusillades… par exemple. Dans ces cas, déplacez le traumatisé vers un emplacement sûr aussi prudemment et rapidement que possible. Un soin particulier doit être apporté si vous suspectez des lésions aux cervicales ou au dos. Utilisez le protocole suivant pour aborder la ou les victimes.
Premiers soins et gestion des blessures légères
1.     Evaluer la situation
2.     Sécuriser les lieux
3.     Evaluer le ou les blessés
a.     Démarrer avec l’ABC de la réanimation
b.     Identifier les blessures ou la maladie
4.     Administrer les premiers soins en tentant de prioriser en fonction de l’état des blessés
5.     Appeler à l’aide via les moyens qui sont les vôtres (VHF, mobile, balise, InmarSat…)
6.     Organiser l’évacuation des blessés vers une zone de soins secondaires adaptée aux besoins du blessé
Il est évident, comme dit dans les premiers chapitres, que suivre une formation afin d’être instruit aux gestes de premiers secours peut s’avérer indispensable en cas de départ en voyage, en mission ou en expédition dans des régions isolées, loin de toute aide médicale. Un secouriste formé devrait être habitué à utiliser l’algorithme suivant pour la prise en charge de la réanimation immédiate d’un blessé. Pour rappel :
 Algorithme de prise en charge ABCDE
A : Airway, prise en charge des voies aériennes
B : Breathing, évaluation et prise en charge de la fonction respiratoire
C : Circulation, évaluation et prise en charge de la fonction circulatoire
D : Déficit, évaluation des déficits moteurs ou neurologiques
E : Exposition, Environnement et Evacuation (protection et préparation)
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Réanimation de base

Que faire en cas de traumas ? Réanimer une victime avec un FaceshieldLe BLS (Basic Life Support) est la doctrine médicale qui traite de l’entretien des fonctions respiratoire et circulatoire sans l’utilisation de matériel à l’exception d’un équipement simple pour le prise en charge des voies aériennes (Pocket-Mask® ou autre) ou d’une protection (type Face-Shield® ou autre) afin d’éviter les éventuelles infections du secouriste lors des insufflations. La combinaison d’insufflations (bouche-à-bouche) et de compressions thoraciques est connue sous le nom de Réanimation Cardio-Pulmonaire (RCP). Le meilleur moyen de maîtriser cette technique est de prendre part à une formation BLS. L’algorithme suivant est donc un simple rappel.
 Algorithme BLS (Basic Life Support) – Normes European Resuscitation Council (ERC) 2015
1.     Sécurité
2.     Evaluer la scène et approche de la victime, en lui parlant (si réponse, la victime est consciente et respire -> prise en charge selon ABCDE
3.     Si pas de réponse : évaluer l’état de conscience de la victime en la saisissant prudemment en l’appelant : « Est-ce que vous m’entendez ? »
4.     Crier pour avoir de l’aide : « A l’aide, au secours ! »
5.     Dégager et libérer les voies aériennes. Ouvrir la bouche, lever toute obstruction éventuelle, désserer foulard, col de veste et tout ce qui pourrait entraver l’entrée d’air dans les voies aériennes.
6.     Effectuerer un VES (Voir-Ecouter-Sentir) pendant 10 secondes maximum en vous approchant de la bouche de la victime afin d’évaluer si elle respire (souffle sur votre joue ? Bruits respiratoires ? Mouvements du thorax ?)
7.     Si respiration, placer la victime en PLS (Position Latérale de Sécuité)
8.     Si PAS de respiration, effectuer 30 compressions thoraciques. 2 mains sur le milieu du sternum et masser de 5 à 6 cm de profondeur, sur le rythme de 100 à 120 battements par minute avec un temps de compression égal au temps de relâchement du thorax.
9.     Effectuer ensuite 2 insufflations par le bouche-à-bouche. Insuffler prudemment jusqu’à ce que le thorax de la victime se soulève. Cette manœuvre ne devrait pas durer plus de 5 secondes.
10.  Alterner 30 compressions et 2 insufflations
11.  Stopper si la victime manifeste des signes de vie (toux, gémissements, râles…) et réévaluer (point 4 et 5)
12.  Si pas de signe de vie, poursuivre le cycle 30-2 (compressions-insufflations), jusqu’à la relève par les secours professionnels ou si votre intégrité physique est menacée

Issue et résultat lors d’une RCP

Survivre à un arrêt cardiaque est le plus probable lorsqu’un témoin est présent auprès de la victime, que très rapidement celui-ci entame une RCP efficace et que la défibrillation (traitement basé sur l’administration de choc électrique au cœur), ainsi que des soins ALS (Advanced Life Support) sont mis en œuvre dès les premiers instants suivant l’arrêt cardiaque. En voyage lointain ou en expédition, particulièrement dans les pays en voie de développement ou en régions isolées, il est très peu probable que ces moyens ALS, tant techniques qu’humains, soient disponibles. Si les tentatives de réanimation sont infructueuses après 30 minutes d’effort, les chances de parvenir à un résultat positif sont alors extrêmement faibles. Il existe cependant trois causes où prolonger les tentatives pourrait s’avérer payant :
  • Les victimes foudroyées
  • Les victimes en hypothermie
  • Les victimes de noyade
Pour ces cas, on note plusieurs cas de réanimation fructueuse après plus de 2 heures d’efforts de la part des secouristes (même n’ayant apporté que du BLS).

Dangers liés à la réanimation

Il existe certaines réticences compréhensibles à propos de la contamination par des maladies sanguines transmissibles durant la pratique de la RCP, particulièrement au sujet des hépatites et du HIV. Bien que certains virus peuvent être repérés dans la salive de personnes infectées, les contaminations sont rares et seuls 15 cas en relation avec la pratique de la RCP sont documentés dans la littérature. Seuls 3 cas de HIV transmis lors d’une réanimation de patients infectés ont été rapportés. 2 de ces cas le furent à cause d’une piqûre malencontreuse avec une aiguille souillée de sang dans le doigt du sauveteur et le 3e suite à un contact important et prolongé avec une plaie de peau étendue et beaucoup de sang. Afin de minimiser le risque de contamination, le secouriste devrait porter des gants et utiliser des protections individuelles (lunette…). Un soin tout particulier doit être apporté à la manipulation d’objets tranchants ou pointus (scalpel, aiguille…).

Les altérations de l’état de conscience

Il est évident qu’il y a lieu de s’inquiéter lorsqu’une personne ne peut répondre oralement ou réagir normalement à une sollicitation verbale suite à un accident ou une maladie. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles quelqu’un peut à un moment voir son état de conscience partiellement ou totalement altéré. Les plus communes sont :
  • Blessures à la tête (traumatisme crânien)
  • Évanouissement
  • Crise convulsive
  • Mort

Que faire en cas de traumas crâniens ?Traumatisme crânien

Les blessures à la tête sont un risque en voyage, particulièrement lors des accidents en milieu montagneux ou avec des véhicules et lors de la pratique de sports extrêmes. Les mécanismes lésionnels significatifs et qui doivent faire suspecter une possibilité de lésion au rachis cervical sont :
  • Les explosions
  • Les chutes de plus de 5 mètres
  • Les accidents de véhicule (auto, bus, moto, vélo…)
Les traumas crâniens peuvent provoquer des altérations de l’état de conscience, des saignements, des infections et des handicaps. Il est capital d’éviter de manipuler la nuque au moment du relevage des victimes de chocs à la tête puisque 10% des individus avec une blessure à la tête ayant entraîné un épisode d’inconscience auront une blessure associée au rachis cervical. Il s’agit d’être suspicieux avec toute victime présentant une blessure significative au-dessus des clavicules. Les traumas crâniens mineurs peuvent causer une perte de conscience transitoire, par contre un trauma crânien ouvert sérieux peut rapidement être fatal. Il est donc important de maîtriser quelques connaissances au sujet des traumas crâniens afin de prendre la bonne décision au sujet de la nécessité d’une évacuation. Voici différents types de traumas crâniens qui seront ensuite détaillés :
  • Traumatisme crânien fermé
    • Avec saignement interne
    • Avec gonflement du cerveau
  • Traumatisme crânien ouvert
  • Fracture de la base arrière du crâne
Traumatisme crânien fermé Dans ce type de trauma, le crâne reste intact et le cerveau n’est pas en contact avec le monde extérieur à la boîte crânienne. Les hémorragies internes et les œdèmes cérébraux (gonflement du cerveau) peuvent compliquer les traumatismes crâniens fermés. Traumatisme crânien fermé avec saignement interne Tout traumatisme crânien peut résulter en une perte de conscience. Si le traumatisme est sérieux, le blessé peut ne jamais recouvrir la conscience. Inversement, une blessure mineure peut avoir comme effet une brève perte de conscience avec une commotion légère (une perte temporaire de la fonction cérébrale). Quand un saignement à l’intérieur de la boîte crânienne a lieu, la victime peut avoir été assommée au moment du choc, reprendre conscience (ce moment est nommé l’intervalle libre ou lucide) et ensuite perdre à nouveau conscience. Le sang se répandant à l’intérieur du crâne exerce une pression sur les tissus du cerveau. Une augmentation de la pression intracrânienne peut accentuer le coma et causer éventuellement le décès. L’échelle simple d’évaluation AVPU nous permet d’évaluer l’état de conscience de la victime. Il existe également l’échelle de coma de Glasgow (GCS) qui permet d’évaluer la meilleure réponse motrice d’un blessé, mais celle-ci étant plus complexe et nécessitant une pratique régulière pour la maîtriser, cet outil d’évaluation ne sera pas abordé dans cet article.
Echelle AVPU
A : Alert and Aware (victime alerte et connectée à son environnement)
V : Voice responsive (victime qui réagit à l’appel de son nom)
P : Pain responsive (victime qui réagit uniquement aux stimuli douloureux)
U : Unresponsive (victime inconsciente, aréactive)
Traumatisme crânien fermé avec œdème cérébral Lors d’un choc à la tête, le cerveau se déplace à l’intérieur de la boîte crânienne et peut être endommagé en cognant les crêtes osseuses à l’intérieur de la base arrière du crâne ou lors de l’impact contre l’intérieur de la voûte crânienne. Plus l’œdème (gonflement) est important, plus le coma sera probablement long et profond. Traumatisme crânien ouvert Ces blessures sont souvent sérieuses du fait que l’intérieur de la boîte crânienne se retrouve en contact avec les éléments extérieurs, ce qui va naturellement sensiblement augmenter le risque d’infection. Un scénario courant est une chute ou un choc entraînant une large lacération du scalp (peau recouvrant le crâne) et une fracture sous-jacente du crâne. Si disponibles, des antibiotiques devraient être administrés de manière précoce (Moxifloxacine 400mg voie orale si possible), surtout si les délais d’évacuation doivent excéder 30 minutes, ce qui est évidemment fréquent en contexte isolé. Dans les cas de traumas sévères après choc important, le crâne se retrouve fracturé, ouvert, exposant ainsi des matières cérébrales. La boîte crânienne est relativement solide et réclame donc un choc important pour produire ces blessures, le pronostic pour ces victimes est souvent pessimiste, résultant en un handicap sérieux ou la mort, même si le blessé rejoint un hôpital correctement équipé et des médecins compétents. Fracture de la base arrière du crâne Ces blessures ouvertes de la tête peuvent être aggravées par une infection provenant du nez, des oreilles ou des sinus. Les symptômes de ce type de fracture sont :
  • Les yeux de raton laveur (Racoon eyes), ce sont des ecchymoses (yeux au beurre noir) autour des 2 yeux suite à un coup sur la tête. Ceci est un signe tardif.Que faire en cas de trauma crânien ouvert ? Symptomes : yeux de raton laveur
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  • Signes de Battle, ce sont des ecchymoses derrière les oreillesQue faire en cas de trauma crânien ouvert ? Symptome : signes de battle
  • Fuite de liquide cérébro-spinal (LCS), par les oreilles ou par le nez.
Le liquide cérébro-spinal (LCS), ou encore liquide céphalo-rachidien (LCR) en ancienne nomenclature, est un liquide biologique transparent dans lequel baignent le cerveau et la moelle spinale. Il absorbe et amortit les mouvements ou les chocs qui risqueraient d’endommager le cerveau. En cas de suspicion de fracture de la base arrière du crâne, les saignements des oreilles et du nez peuvent contenir du LCS. Il est alors indiqué de réaliser le test du halo (Halo Test) afin de confirmer l’écoulement de LCS par ces voies. Si le Halo Test est positif, il convient d’administrer des antibiotiques durant l’évacuation du blessé du fait du haut risque d’infection. Que faire en cas de trauma crânien ? Halo testHalo test :
  1. Si suspicion d’une fracture de la base arrière du crâne
  2. Collecter au moyen d’une compresse stérile un peu des écoulements de l’oreille ou du nez
  3. Si 2 cercles concentriques plus foncés apparaissent, suspecter une fuite de liquide cérébro-spinal (LCS)
  4. Précocement, lors de l’évacuation, administrer 400mg de Moxifloxacine en prise orale si l’état de la victime lui permet d’avaler. Utiliser une voie IV/IO si vos compétences le permettent.

Traitement des blessures à la tête

Ce type de blessures doit être traité en accord avec les principes de premiers secours suivants (v. ABCDE) :
  1. Sécurité pour vous, votre environnement et votre victime
  2. Si le mécanisme lésionnel est significatif, effectuer un maintien manuel de la tête de la victime en évitant de comprimer le crâne
  3. Airway (VAS)
Les voies aériennes supérieures (VAS) d’un blessé inconscient sont à risque du fait du risque important de vomissement pour ce type de traumatisme. En fonction du niveau d’inconscience, les réflexes de toux et de déglutition aidant à auto-dégager les VAS peuvent ne plus fonctionner normalement. Il faut donc placer prudemment (et en maintenant la tête alignée) les victimes en PLS. La technique du soulèvement du menton associée à une bascule de la tête (à proscrire en cas de suspicion d’une atteinte aux cervicales ou à une subluxation de la mandibule) permettront, de manière non invasive, de maintenir les VAS ouvertes chez une victime inconsciente. Si la victime est consciente et qu’elle présente des traumas faciaux importants (fractures du nez, de la mâchoire, des dents, perte de morceau de langue, des os de la face…), que des saignements encombrent les VAS, que le mécanisme lésionnel n’est pas significatif, il faut autoriser la victime à se positionner comme elle le souhaite. En général, assise, penchée vers l’avant, pour permettre les écoulements de sang et autres fluides vers l’extérieur et non pas dans les VAS
  1. Breathing (respiration)
Maintenant que les VAS sont ouvertes et protégées, évaluer la respiration de la victime (normale, laborieuse, rapide, superficielle… ?), compter la fréquence ventilatoire (inspiration-expiration) durant 30 secondes et multiplier ce chiffre par 2. La valeur normale pour un adulte se situe entre 12 et 20 par minute. Un chiffre sous et au-delà de ces valeurs est un signe de souci respiratoire.
  1. Circulation
Contrôler par compression et pansement tout saignement. Tenter de trouver un pouls radial (poignet) au moyen de l’index couplé au majeur (ne pas utiliser le pouce), le compter durant 30 secondes et multiplier ce chiffre par 2. La valeur normale pour un adulte se situe entre 60 et 100 pulsations par minute. Un chiffre sous et au-delà de ces valeurs est un signe de souci circulatoire.
  1. Déficit neurologique
Évaluer l’état de conscience en utilisant l’échelle AVPU Contrôler les pupilles de la victime. Elles doivent être rondes, symétriques et réagir en se contractant lors de la diffusion d’un faisceau lumineux (lampe frontale) en leur direction. Une ou des pupilles ne réagissant pas – restant dilatées ou contractées – sont un signe sérieux d’atteinte neurologique et l’évacuation de cette victime devrait être une priorité.
  1. Environnement
Inspecter avec soin la victime de la tête aux pieds en visualisant chaque partie du corps, mais en gardant à l’esprit qu’il est indispensable de prévenir l’hypothermie. Traiter au fur et à mesure de ce qui est découvert. Protéger le blessé des conditions climatiques.

Traumatismes crâniens et nécessité d’évacuation

Quand ce type de traumas arrive en zone isolée, que ce soit en mission, en expédition ou en voyage lointain, il est souvent difficile de décider s’il est adéquat d’annuler l’expédition et de planifier une évacuation vers la structure sanitaire la plus proche ou s’il serait mieux d’observer l’évolution de la victime au camp, à la base ou chez l’habitant où l’on séjourne. Les groupes suivants de victimes doivent toujours être évacués et nécessitent un avis médical avisé :
  • Les victimes qui restent inconscientes
  • Les blessés qui présentent une fracture ouverte du crâne ou une fracture de la base arrière du crâne (même fermée)
  • Les blessés qui ont eu des convulsions
La décision d’évacuer une victime consciente suite à un traumatisme crânien est plus délicate.
Les indicateurs suivants pourraient être utiles pour prendre la décision :
  • Maux de tête s’aggravant
  • Vomissement
  • Somnolence
  • Confusion
  • Pupille aréactive, dilatée d’un ou des deux côtés
  • Convulsions
  • Sang ou fluide s’écoulant du nez ou des oreilles
  • Lacérations profondes du scalp
  • État de conscience se dégradant
Il est toujours mieux d’être trop précautionneux dans les cas de traumatismes crâniens. Dans le doute, il convient de prendre les dispositions pour évacuer la victime pour une évaluation médicale en milieu hospitalier.

Évanouissement

L’évanouissement n’est pas communément défini comme un problème médical sérieux. Cela peut suivre une sévère douleur aiguë, une insolation, une déshydratation, un manque de nourriture ou un stress émotionnel. Les évanouissements sont provoqués par une diminution temporaire du flux sanguin dans le cerveau. Le pouls devient très lent durant un évanouissement, à l’inverse du choc durant lequel le pouls accélère. Une personne qui est sur le point de s’évanouir devient habituellement très pâle, commence à transpirer et peut éventuellement se sentir nauséeux. Dès les premiers signes, il faut encourager la victime à s’asseoir la tête entre les jambes ou à se coucher sur le dos. Si la victime perd conscience, la laisser couchée, mais lui relever les jambes à 45° et relâcher les vêtements trop serrés afin de faciliter la circulation sanguine. Dès que la victime recouvre conscience, la rassurer et si elle a chuté au moment de la perte de connaissance : procéder à un contrôle de la tête aux pieds afin de repérer d’éventuelles lésions dues à la chute sur le sol

Convulsions

Un spasme ou une convulsion est causé par une activité électrique anormale dans une ou plusieurs parties du cerveau. Les convulsions sont le plus souvent observées chez les personnes souffrantes d’épilepsie, mais peuvent également survenir chez les malades atteints d’infections cérébrales (méningite et encéphalite), de tumeur cérébrale ou suite à un traumatisme crânien. Les personnes atteintes de diabète peuvent également convulser quand leur glycémie (taux de sucre dans le sang) devient trop basse, on parle alors de coma (choc insulinique). Les personnes intoxiquées par l’alcool ou la drogue peuvent aussi convulser durant la phase de sevrage. S’il y a une personne épileptique dans l’équipe ou l’expédition, il serait judicieux d’en apprendre davantage sur la gestion de sa maladie et de son traitement. Si une crise convulsive survient, il est important de prendre note des détails suivants :
  • Durée des convulsions
  • Y a-t-il eu perte de conscience ?
  • Est-ce que les 4 membres ont convulsé ?
  • Y a-t-il eu roulement des yeux, forte salivation ou incontinence ?
  • Y a-t-il eu une période de somnolence après la crise ?
Durant une crise convulsive, des dents peuvent être cassées, les joues et la langue peuvent avoir été mordues. Il s’agit dès lors d’être attentif à la perméabilité des VAS. La victime peut vomir et inspirer une partie de ces rejets dans les poumons entraînant une pneumonie, voire une asphyxie. Des blessures, parfois sérieuses, peuvent se produire suite à une chute au début de la crise convulsive. Des convulsions prolongées peuvent priver le cerveau d’oxygène et avoir pour conséquence des lésions au cerveau, ceci est cependant plutôt rare. Prise en charge lors d’une crise convulsive :
  • Ne pas tenter d’immobiliser une victime de convulsions, sauf si une blessure est probable.
  • Durant la crise, ne rien tenter à l’exception de protéger la victime d’une chute sur un objet en dégageant ses alentours
  • Ne rien introduire dans sa bouche (stylo, morceau de bois…) afin d’éviter de casser des dents ou de se faire mordre
  • Quand les convulsions sont terminées, libérer et protéger les VAS
  • Placer la victime en PLS
  • Si les convulsions surviennent après un trauma crânien, procéder à une évacuation rapide de la victime
  • S’il y a suspicion de méningite, traiter avec antibiotiques et évacuation rapide. Il faut suspecter une méningite en présence des symptômes suivants : forte fièvre, maux de tête aigus, vomissement, raideurs dans la nuque, hypersensibilité à la lumière et éruption cutanée.

Diagnostiquer la mort

Malheureusement, la mort est toujours un risque dans les activités en contexte isolé. Il est essentiel de pouvoir diagnostiquer la mort avec certitude, particulièrement si le corps, pour diverses raisons, en fonction du contexte de voyage, d’expédition, doit être laissé sur place. Au sujet des victimes d’hypothermie et d’immersion dans l’eau froide, les Anglos Saxons citent fréquemment comme base de la prise en charge, l’adage : « Nobody is dead until warm and dead », littéralement : « Personne n’est mort avant d’être chaud et mort ». Ce qui signifie que ce type de victimes ne devrait jamais être considéré comme morte avant d’avoir été correctement réchauffé. La littérature est riche de publications faisant état de victimes hypothermes ayant survécu après une prise en charge énergique donnant ainsi raison à l’adage. Si le corps doit être abandonné, il est important de prendre des photos et de particulièrement bien documenter les circonstances et tous les actes entrepris afin que le secouriste soit capable d’établir les faits auprès des autorités. Les signes de mort :
  • Inconscience
  • Absence de sons du cœur (à écouter avec un stéthoscope ou avec l’oreille durant 2 minutes)
  • Plus d’activité respiratoire
  • Les pupilles restent fixes et dilatées, même stimulées par une lumière en leur direction
  • Lésions incompatibles avec la vie (décapitation, démembrement du tronc, corps congelés et durcis depuis plusieurs jours…)
  • Décomposition avancée
Dans la prochaine édition, nous clôturerons ce chapitre dédié aux traumas en développant les problèmes aux os et aux articulations, ainsi que la gestion graduelle de la douleur simple à sévère, facteur indispensable au maintien du blessé, surtout si l’évacuation de ce dernier est différée de quelques heures, voire quelques jours et à réaliser avec des moyens austères. Bons voyages. Stay safe, sharp and ready ! Joël Medic pour Régions Isolées Sources : Emergency Care, 5th edition, Nancy Carolin, AAOS – PHTLS (Pre Hospital Trauma Life Support) book, 8th edition – ERC guidelines 2015First Aid and Wilderness Medicine, Dr J. Duff et P.Gormly – Journal of Travel Medicine, UK
  1. Le risque sanitaire en voyage (statistiques, vigilance, préparation)
  2. Les problèmes gastro-intestinaux
  3. Les traumas
  4. Les plaies simples et graves
  5. Problèmes médicaux généraux (Malaises)
  6. Problèmes liés à l’environnement (Pollution, eau, froid, chaleur, soleil, foudre, altitude)
  7. Insectes, animaux venimeux et empoisonnement
  8. Problèmes dermatologiques
  9. Les infections tropicales (Malaria, dengue, hépatites)
  10. Problèmes dentaires
  11. La pharmacie et la trousse de premiers soins
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