Malaise à Bijilo
J’aurai mis du temps à écrire cet article, à mettre des mots sur mon fouillis d’impressions de notre court séjour à Bijilo en Gambie. La Gambie, ce petit pays enclavé dans le Sénégal, ce bastion anglophone entouré des grands pays francophones d’Afrique de l’Ouest ! Ce pays m’intriguait. Pourquoi cette enclave ? Et cela signifiait-il que le pays, sa culture, ses traditions, ses infrastructures, était différent du Sénégal ? Qu’allais-je y trouver ? Je me réjouissais d’aller y passer une semaine avant de revenir en Belgique. Je savais que c’était trop court pour découvrir et comprendre mais, c’était déjà une jolie introduction. Au final, rien ne s’est passé comme je l’avais imaginé (comme souvent d’ailleurs) et je n’ai pas réussi à apprécier mon séjour. Il y avait ce malaise permanent sur lequel je n’arrivais pas à mettre des mots, il y avait cette envie de fuir cet endroit où j’étais tombée, le sentiment de ne pas être à ma place. Après les très belles semaines passées au Sénégal, j’ai ressenti comme un choc et beaucoup de solitude. Peut-être était-ce lié à la langue ? Peut-être à l’accueil reçu aux postes-frontières ? Ou tout simplement à Bijilo ? Ou un peu des trois… Je n’ai pas beaucoup sorti l’appareil photo pendant ce séjour. Le cœur n’y était pas. Tentative d’explication…
Changement de plan
J’avais choisi de terminer mon séjour en Casamance à Kabadio afin de pouvoir continuer vers la Gambie en traversant la frontière en pirogue de Niafourang à Kartong sur le fleuve Allahein et ainsi remonter vers l’aéroport de Banjul en longeant la côte. En tant que belges, nous n’avons pas besoin de visa pour nous rendre en Gambie. Le passage me semblait donc tout à fait possible. Toutefois, avant d’y aller, j’ai voulu me renseigner sur la faisabilité du projet car pour sortir du Sénégal à Niafourang, il n’y a pas de poste-frontière. Je n’aurais donc pas pu faire tamponner mon passeport en sortant du territoire sénégalais. En Gambie, le contrôleur du poste à qui j’ai demandé si cela ne posait pas de problème ne m’a pas inspiré confiance. Il voulait tamponner mon passeport directement et que je lui paye mon passage.
De Kabadio à Bijilo
Se rendre du campement villageois de Kabadio au B&B de Bijilo relève presque de l’expédition et nécessite de longues heures de voyage et beaucoup de patience ! Tout d’abord, il faut attendre les motos pour rejoindre la route principale où nous attendons un bus qui nous amène à la gare routière de Diouloulou. De là, nous attendons encore qu’un taxi-brousse se remplisse pour rejoindre Séléti, le poste-frontière sénégalais. Le passage de la frontière se fait rapidement et le taxi-brousse nous conduit même jusqu’au poste gambien. Nous sommes invités alors à entrer dans le bureau du chef qui termine son repas. Il commence à m’interroger sur ma présence, le fait que je voyage seule avec un enfant, ce que je fais dans la vie, ce que je gagne tous les mois. Il me demande ce que je compte faire en Gambie, où je vais, si j’ai des amis à Bijilo, si j’ai aimé le Sénégal, si mon mari est d’accord que je voyage seule avec notre fils, si je suis croyante. Après cet interrogatoire en bonne et due forme, il ouvre nos passeports et appose le cachet. Il nous souhaite un bon voyage et ordonne à un de ses officiers de nous accompagner jusqu’au taxi-brousse, qui ressemble davantage à une carcasse de voiture qu’à une voiture. Là encore, nous attendons d’être assez nombreux (trop nombreux) pour rejoindre Brikama. Il fait chaud, la carcasse est archi-pleine, Sacha est sur mes genoux et deux enfants pleurent. Le trajet n’est heureusement pas trop long et nous arrivons assez vite à la gare routière de Brikama. Les routes, ici, sont en excellent état. De Brikama, nous devons prendre un bus pour rejoindre Bijilo. Pas d’informations claires et précises, de nombreux hommes tentent de prendre mon sac pour m’aider, m’invitent à les suivre ou m’indiquent différentes directions. Dans la frénésie de cette gare routière, j’ai la tête qui tourne. Je dois veiller sur Sacha et trouver le bon bus. Finalement, une femme nous prend sous son aile et nous conduit au bon endroit. Je prends nos tickets, je paye pour le sac et nous nous installons dans le bus. Une fois de plus, nous attendons patiemment que le bus se remplisse. Un collant me parle, me sourit, me demande si j’ai besoin de quelque chose, si je ne peux pas lui donner un peu d’argent, si nous ne pouvons pas passer quelques heures ensemble. J’aurai ce genre de contacts avec la gent masculine assez souvent en Gambie. Une femme chasse le malotru et s’assied à côté de moi. La solidarité féminine est bien présente ici. Arrivés à Bijilo, nous devons prendre un taxi pour nous rapprocher du B&B. Les quelques indications dont je dispose ne sont pas très claires et je n’arrive pas à joindre la propriétaire. GT, qui est dans le même taxi que nous, nous propose de nous aider et nous accompagne jusqu’à la résidence assez éloignée de la route principale et non indiquée. Une aide généreuse et bien intentionnée. Il nous invitera d’ailleurs à venir partager un repas dans sa famille et viendra nous chercher avec son petit frère de l’âge de Sacha pour faire un tour sur la plage. Grâce à GT, nous arrivons à bon port après une longue journée sur la route !Malaise à Bijilo
Dès la première soirée, je ne me suis pas sentie à l’aise à Bijilo. Peut-être était-ce lié au fait que Bijilo signifiait la fin du voyage ? Peut-être parce que j’étais contrariée de ne pas être là où j’avais envie d’être ? Peut-être parce que je ne le sentais pas tout simplement ? Notre B&B était assez isolé du centre, des restaurants, des magasins et de la plage. Un endroit, certes très confortable, mais froid. Après l’accueil chaleureux, la vie, les sourires, les rires, les belles rencontres du Sénégal, le contraste m’a quelque peu déconcertée. Un grand vide, une grande mélancolie, la solitude. Et même si j’aime la solitude, même si je suis souvent seule, j’ai besoin de sentir de la bienveillance autour de moi. Une vie joyeuse. Une énergie positive. Rien de tout ça ici. Nous passerons un séjour impersonnel qui n’aide pas à se sentir le bienvenu. Heureusement, Mohamed, le gardien sympathique, l’eau chaude, la connexion Internet et le bon petit-déjeuner aident à passer le temps.Que faire à Bijilo ?
Pour autant, est-ce un endroit à éviter et sans intérêt ? Les seuls intérêts de Bijilo sont sa plage, son marché artisanal et son parc forestier, le Bijilo Forest Park.Partie remise ?
Bien que nous n’y soyons pas restés très longtemps, Bijilo peut être une base pour découvrir la côte atlantique et les alentours afin d’allier découverte du pays et séjour balnéaire. Pour ma part, je ne retournerai pas à Bijilo. Je suis rentrée déçue et gênée de notre court séjour en Gambie. Et pourtant, la Gambie semble être un pays magnifique. Alors, je me suis promis d’y retourner, de remonter son fleuve et d’y passer plusieurs semaines pour mettre à mal mon ressenti et avoir une vision plus positive, pour y voir une Gambie différente de cette côte touristique et un peu malsaine.Tabakoroni, un conte d’aujourd’hui
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