Découvrir Prague avec un enfant…
Prague ! Prague, le souvenir d’un voyage scolaire culturel à 16 ans à arpenter les rues à la découverte des monuments historiques et à admirer les façades Art Nouveau dont regorge la capitale tchèque. Prague, le souvenir aussi d’un passage éclair, entre deux trains, aux petites heures et d’une déception à voir cette ville au passé si riche vendue au tourisme de masse. Ce matin-là, nous revenions de Zakopane en train de nuit. Nous avions accumulé en trois jours très peu d’heures de sommeil et nous sentions légèrement ivres. Notre perception de la ville et de son ambiance s’en est sûrement ressentie. Nous étions pleins d’idéaux, plongés dans une vision romantique et nostalgique des voyages en train des siècles passés. Peut-être est-ce cet état confronté à la réalité des rues arborant toutes les mêmes enseignes internationales, ou des boutiques-souvenirs sans goût en bas d’immeubles sublimes, ou encore des premiers groupes de touristes suivant un guide au parapluie levé qui nous a donné envie de fuir la ville et de ne plus y mettre les pieds ? Trois ans plus tard, j’y remets pourtant les pieds, avec mon fils cette fois. Mais que faire avec un enfant dans une ville-musée ? Si Sacha apprécie les visites de musée et ne rechigne pas à marcher, je n’avais pas envie de lui présenter la ville en suivant l’itinéraire classique. Je n’avais pas envie non plus de me mêler à la foule et d’être stressée. J’ai donc décidé d’aborder la ville autrement pour avoir une autre image de cette Prague touristique bien connue (le Château, le pont Charles, l’horloge astronomique, le quartier juif…) en choisissant de la parcourir de parc en parc. Des lieux de vie où se rassemblent souvent les familles et où Sacha peut évoluer librement, courir, tourner, profiter du soleil et de la douce ombre des arbres, jouer, ramasser des morceaux de bois, des feuilles et autres curiosités pour ses collections. Nous avons beaucoup marché, nous avons pris des trams, nous nous sommes souvent trompés d’arrêt, nous avons assisté chaque soir à de merveilleux couchers de soleil, nous avons ri et pique-niqué dans l’herbe. Nous avons passé trois jours dans une toute autre ville que celle que j’avais visitée à l’époque. Je vous invite donc à une balade, parfaitement adaptée aux familles, à Prague, au travers de ses espaces verts.
Jour 1 : Ascension de la citadelle de Vyšehrad
En ce début de mois de septembre, les températures sont très élevées. Alors, après un plongeon dans la piscine glacée de l’auberge, nous prenons un peu de hauteur pour aller nous promener dans le parc de la citadelle de Vyšehrad. Une brise tiède nous rafraîchit, les arbres nous offrent leur ombre et des glaces enchantent nos papilles. Un vrai réconfort après notre longue marche et notre ascension jusqu’au sommet de la colline. En effet, pour nous y rendre, nous prenons le tram mais je n’ai aucune idée de l’arrêt où nous devons descendre. J’observe, j’estime, je compte. Trop tard ! Nous sortons trois arrêts plus loin. Je n’ai pas envie d’attendre dans l’autre sens. Et puis, j’aime marcher et découvrir des quartiers de manière tout à fait inattendue. Alors, nous avons marché jusqu’au parc en suivant tant bien que mal le plan fournit par le guide. Nous arrivons à la porte Tabor, celle qui marque l’entrée de la citadelle, fatigués et en nage. Nous poursuivons notre chemin et montons sur les remparts qui offrent une vue panoramique sur Prague. Nous nous asseyons un instant. Admirons le paysage. Profitons du calme et de la brise. Sacha part à la recherche de trésors pendant que je photographie ce qui nous entoure. Reposés, nous continuons la visite des lieux. A cause de notre détour, nous arrivons trop tard pour visiter les caves gothiques relatant l’histoire de cet endroit très symbolique pour les praguois car il est considéré comme étant le berceau de la ville. Le site est habité depuis le 9e s. et a joué un rôle important au cours de l’Histoire.
Par contre, nous admirons la magnifique église Saint-Pierre-et-Paul, ses portes décorées et colorées et ses flèches gothiques impressionnantes et flânons dans les allées du cimetière où sont enterrés de grands artistes tchèques tels que Dvořák, Smetana ou Mucha.
Nous assistons également à un magnifique coucher de soleil jouant avec les nuages et stimulant l’imagination. Se joignent à nous des personnes en tous genres et de tout âge. Comme si c’était là un rendez-vous quotidien avec l’astre solaire.
Les derniers rayons disparus, nous prenons la direction de la sortie. En chemin, nous rencontrons une magnifique plaine de jeux tout en bois et en corde. D’autres familles y sont. Les parents sont assis sur les bancs autour pendant que les enfants jouent. Pour ma part, j’en profite autant que Sacha. La nuit tombe et nous nous remettons en route pour retourner à l’auberge. Deuxième tentative manquée car nous sommes attirés par une porte éclairée vers laquelle se dirigent quelques groupes. Nous les suivons et entrons dans une sorte de grand jardin avec des tables un peu partout et un magnifique panorama. Un bar, le Na hradbach, et un grill, le Gigi Migi Grill, en plein air ! Des jeunes, des amis, des couples, des familles qui viennent prendre un verre en fin de journée. Les enfants peuvent jouer et crier. L’endroit parfait où terminer notre journée. Nous prenons quelques légumes grillés et une saucisse pour Sacha et nous joignons à une tablée. C’est convivial et bon marché. Une excellente adresse où venir en famille un soir d’été. Notre séjour à Prague commence plutôt bien !
Jour 2 : De Petřin à l’île Slave en passant par le musée Franz Kafka
Puisque la journée s’annonce à nouveau très chaude, nous décidons de prendre encore un peu de hauteur en allant nous balader du côté de Petřin. Culminant à 318 m, on peut y grimper à pied ou prendre le funiculaire (inauguré en 1891 et reconstruit en 1932).
La colline de Petřin, qui domine la ville et son cœur historique, et ses vergers offrent un cadre très agréable où se promener en famille. Programme du jour : la tour d’observation, le Labyrinthe des Miroirs et un glaçon allongés dans l’herbe. Nous montons tout en haut de la Tour d’observation, une sorte de mini tour Eiffel d’une hauteur de 60 m construite en 1891 à l’occasion de l’Exposition Universelle de Prague. La 299e marche gravie, le spectacle sur la ville est incroyable : le Château, le Pont, le Monastère de Strahov, la Tour de Télévision. Il est possible d’y monter en ascenseur mais le spectacle n’aurait pas la même saveur.
Juste à côté de la Tour se trouve la Galerie des Glaces (Zrcadlové Bludištĕ) où nous passons un excellent moment à nous perdre dans le labyrinthe, à nous saluer, à nous tenir la main, à danser et à rire devant nos corps déformés par les miroirs déformants. Je vous recommande d’y aller avec vos enfants, vous vous y amuserez autant qu’eux !
Après ces émotions fortes, il était temps pour nous de nous poser de pique-niquer à l’ombre d’un grand arbre avant de redescendre la colline.
Pour la suite de la journée, j’hésite entre le Monastère de Strahov et sa magnifique bibliothèque et le Musée Franz Kafka. Au vu du monde qui se presse vers le Monastère, j’opte pour le Musée consacré au célèbre écrivain praguois. Sur le chemin, nous croisons le mur John Lennon, lieu historique de la contestation des jeunes face au régime communiste. Recouvert du portrait de l’artiste, de nombreux messages de paix, de quelques slogans politiques et d’autres tags sans intérêts, il est désormais un lieu devant lequel il est bon de se prendre en photo. Nous passons aussi sur le Pont des Amoureux. Cette mode des cadenas semble s’être installée un peu partout ! Et puis, nous faisons halte dans une jolie librairie anglaise, Shakespeare & Sons, où nous flânons dans les rayons et lisons quelques livres en anglais confortablement installés dans les fauteuils. Enfin, enfin, nous arrivons au Musée Franz Kafka où nous sommes accueillis par une sculpture animée de l’artiste David Černý assez interpellante intitulée Proudy (« Jet »). Si, au premier abord, on s’amuse de voir deux hommes face à face en train d’uriner, on en vient rapidement à se demander quelle était l’intention de l’artiste en les faisant tracer avec leur jet des citations de la littérature nationale dans un bassin en forme de République tchèque. Je reste perplexe bien qu’amusée. Le Musée Kafka est un musée très réussi. La scénographie est excellente, elle rend parfaitement le climat qui règne dans l’œuvre de l’auteur et elle est dynamique. Ayant lu plus jeune Le Journal de Kafka, j’ai pu mettre des images sur les mots. J’ai aimé cette visite. Toutefois, elle n’est pas adaptée à un enfant de 4 ans. Pas d’interactivité et une atmosphère angoissante et dérangeante. Vers la fin de la visite, Sacha me pressait de plus en plus vers la sortie.
Pour terminer la journée sur une note plus légère, nous décidons d’aller sur l’Île aux Enfants, la plus petite île de Prague, qui comme son nom l’indique est une île réservée aux enfants. Enfin, c’est ce qui était indiqué dans le guide et ce que j’avais partiellement vérifié sur Internet. Sauf que, après un énorme détour à pied, lorsque nous arrivons devant la dite île, je ne vois rien qui me semble un tant soit peu correspondre à des jeux pour enfants ni de parents à l’horizon. L’Île des Enfants serait-elle ailleurs ? Non, c’est bien celle indiquée sur le plan. Sur la Vltava, nous voyons des pédalos et, sur l’île d’en face, l’Île Slave, des enfants qui jouent. Nous décidons alors de retraverser le pont pour aller voir ce qui s’y passe. Nous arrivons malheureusement trop tard pour les pédalos mais nous trouvons enfin la plaine de jeux. Je m’assieds sur un banc, souffle un peu et observe le soleil qui se couche pendant que Sacha s’amuse avec d’autres petites filles. Quelle journée de marche !
Jour 3 : Le parc Stromovka ou l’art de ne pas aller au zoo
Quand on a des enfants, on se dit souvent qu’une sortie au zoo est un incontournable. Alors, même si je n’aime pas du tout aller au zoo parce que je n’aime pas voir les animaux privés de liberté, je prévois pourtant à chaque fois d’y aller pour Sacha. Cependant, je crois qu’il n’apprécie pas particulièrement les zoos puisque, quand nous y allons, il ne s’attarde pas vraiment devant les animaux mais préfère courir et ramasser des trésors. Je tente malgré tout à nouveau une sortie au zoo de Prague, considéré quand même comme un des plus beaux zoos du monde. Peu pressée d’arriver, je décide d’abord d’aller faire un tour au parc des Expositions (Výstavištĕ) situé juste à l’entrée du parc Stromovka, le plus grand parc de la ville, et de le traverser pour rejoindre le zoo.
Le parc est un lieu très apprécié des praguois, un peu comme le Bois de la Cambre à Bruxelles. On y vient pour faire du sport, se détendre entre amis ou pique-niquer en famille. Aujourd’hui, nous prenons notre temps, j’initie Sacha à la photographie dans le parc, nous sentons les rosiers jaunes, roses, blancs, rouges, essayons de distinguer si les parfums sont différents et observons la vie dans le parc. Des femmes se promènent avec leurs enfants, des amies font une séance de taï chi, d’autres jouent de la musique. Tout à coup, nous tombons sur une magnifique aire de jeux. Sacha s’élance et embarque dans la locomotive. Je me dirige vers la terrasse du restaurant situé judicieusement juste à côte de la plaine de jeux.
Soudain, j’entends un grand cri suivi de pleurs. Je reconnais ceux de Sacha et cours vers le train. Une petite fille est en train de le mordre pour qu’il bouge. Pas de parents en vue. Je commence donc à montrer et à expliquer à cette petite fille que cela ne se fait pas et qu’il y a d’autres façons plus courtoises pour demander les choses. Elle ne me comprend pas bien sûr et ne semble pas du tout touchée par les pleurs de Sacha. Elle nous bouscule pour prendre les commandes du train. Sacha ne veut plus rester près d’elle et s’en va. Il l’évitera tout le temps où nous resterons à la plaine de jeux. Nous mangeons au Vozovna Stromovka de délicieuses pommes de terre au four fourrées accompagnées d’un délicieux jus de gingembre. L’endroit est agréable, au calme et très family-friendly. Le repas terminé, je me dis que nous pourrions malgré tout tenter de rejoindre le zoo et y passer l’après-midi. Nous quittons donc cette plaine de jeux idéale et poursuivons notre promenade. Mais, en chemin, un bac à sable fait les yeux doux à Sacha. Je ne suis pas très motivée par le zoo et je préfère qu’il joue dans un parc avec d’autres enfants. Sacha se met à construire des circuits et châteaux de sable avec un autre petit garçon. Ils font la course et jouent aux aventuriers. Pendant ce temps, j’observe les passants, prends des photos, souris aux parents et écris quelques mots dans mon carnet. Le temps s’écoule tranquillement. Nous sommes bien. Nous sommes là. Nous profitons de l’instant. Je regarde l’heure. Dommage ! Il est trop tard pour aller au zoo.
Tant pis, nous resterons dans le parc et nous irons faire un tour au Planétarium. Même si c’est encore assez complexe à comprendre pour Sacha et même si les explications sont essentiellement en tchèque et en anglais et qu’il m’est difficile de traduire exactement, nous passons un très bon moment à rouler sur la lune et sur Mars, à nous peser sur les différentes planètes et à faire quelques expériences. Par contre, la projection était uniquement en tchèque.
Nous quittons le parc. Un écureuil nous salue et nous montre ses talents d’acrobates. (J’étais tellement heureuse de le croiser que j’ai raté toutes mes photos prises dans la précipitation contenue.) Le soleil se couche et nous offre une explosion de couleurs annonçant l’automne.
Nous rentrons apaisés. Heureux d’avoir passé une journée en plein air, sans nous presser, à prendre le temps, à profiter du soleil et de la douceur de l’air, à observer la vie, à courir entre les arbres, à prendre des photos et à ramasser des trésors.
Une autre Prague
Je suis très contente d’avoir abordé Prague par ses espaces verts. Loin de la foule et de l’agitation, nous avons pu profiter de chaque instant en nous sentant libres de nos mouvements. Bien que nous soyons restés en général assez loin des principaux axes touristiques, nous avons malgré tout vu certains lieux incontournables de la ville. J’aime l’idée que les villes aient des facettes multiples et que l’expérience que nous en aurons dépende de la manière dont nous l’abordons. Pour mon troisième passage à Prague, j’ai vu une ville totalement différente. Une ville qui semble agréable à vivre et habitée, une ville verte, belle et paisible, une ville pleine d’énergie et qui va de l’avant. Et j’ai l’impression de n’avoir encore rien vu. Qu’elle regorge encore de beautés, de coins inattendus, de surprises et de vies. Prague est une ville où l’on retourne. Encore et encore. Quelques jours. Le temps d’un long week-end.
Et vous, avez-vous visité Prague avec vos enfants ? Quels ont été vos coups de cœur ? Que nous conseilleriez-vous de visiter lors de notre prochaine escapade dans la ville d’or ?
L’article vous a plu ? Partagez-le sur Pinterest.Sur les bords de l’Elbe
Les fleuves alimentent en grande partie mes rêveries romantiques. Le Rhin, la Loreleï et Wagner. La Seine et le Pont Mirabeau d’Apollinaire. Le Mékong, le Triangle d’or et l’Indochine. Le Niger, René Caillé et Tombouctou. Ou encore, l’Elbe, la Bohême, ses châteaux et...